Bonjour à vous, amis du vin !
C’était avant que la monde ne prennent un détour étrange, au mois de mars; On ne le savait pas encore mais il faudrait, un jour, que chacun sorte le visage entravé par un masque afin de limiter les risques. (personnellement, il y a bien des jours où mon unique secret de beauté reste la pénombre, et où je me dis que ce damné masque est un mal pour un bien!).
J'avais eu à l'époque le plaisir de faire, lors d'une soirée dégustation à l'aveugle, un petit piège à ma façon autour de 2 pinots noirs, l'un de Bourgogne, l'autre d'Alsace; Les pinceaux s'étaient emmêlés dans l'assistance et des débats passionnés étaient nés, particulièrement autour des appellations bourguignonnes. "Mais non, ça peut pas être un grand cru, y'en a pas à Volnay, et c'est sur que c'est du Volnay, c'est tout en dentelle, beaucoup moins puissant que du Pommard" ; " Ah bon, Pommard c'est plus puissant?" ;
" Vous êtes sur que c'est en Bourgogne Pommard?" Bien des questions auxquelles je ne savais pas forcément répondre m'ont été posées ; il est indéniable que cette appellation émerveille autant qu’elle interroge, et c’est évidemment un immense plaisir pour moi de m’interroger avec vous… Alors, si vous le voulez bien, oublions quelques instants les tracas du quotidien, la rentrée forcément pas très folichonne, le contrôle technique de la bagnole qui expire... partons pour « une petite virée en Bourgogne sans quitter son canapé » !
L’objectif est d’arriver à une compréhension fine de ce vignoble en s’intéressant de près aux différents paramètres qui en font l’unicité.
Aujourd’hui, nous descendons au cœur du sous-sol bourguignon afin d'en comprendre certaines de ses subtilités.
Et si, à tout hasard, vous avez quelques vieux Bourgogne qui trainent, c’est le moment de faire chauffer le tire-bouchon et de penser au regretté Jean-Pierre Coffe qui disait « Le meilleur moyen d’être sûr que vos vins vieillissent bien, c’est de les boire jeunes !».
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Je précise que ce petit voyage est le fruit de lectures, documents vidéo et discussions que j’ai eu ces derniers temps et dont vous retrouverez la source dans le bouton « bibliographie » ; étant à l’origine un voisin jurassien, c’est aussi le résumé de longues randonnées/observation/dégustations que j’ai pu réaliser. Vos retours me seront précieux ! N'hésitez pas à commenter et à rejoindre notre communauté sur Facebook et Instagram @levinauvert56

Accrochez vos ceintures, c'est parti! Si les climats bourguignons (la dénomination locale des parcelles) sont classés depuis 2015 au patrimoine mondial de l’UNESCO, c’est qu’ils sont uniques à plusieurs égards...
On entend régulièrement que c’est un vignoble trop compliqué à comprendre. Je dirais que c’est vrai et faux à la fois ! Faux car sa géographie et son organisation sont assez simples à appréhender : on parle d’une longue bande de terre qui s’effile de Dijon au nord à Mâcon au sud, à laquelle on ajoute l’Auxerrois et le Chablisien plus au nord. 3 départements sont représentés (Yonne, Côte d’Or et Saône-et-Loire) à travers 84 appellations hiérarchisées en 4 niveaux très lisibles.
On y retrouve 2 cépages quasiment uniques : le pinot noir et le chardonnay (lui-même un descendant du pinot noir, croisé avec le gouais blanc) pour 91% de la superficie. On citera également l’aligoté (6% de la surface), le gamay (2,5%, autorisé dans le Bourgogne passe tout grain) le césar et le sauvignon (0,5%, à Saint-Bris uniquement).
En tout, ce sont 28000 hectares de vignes cultivés (soit 4 fois moins qu’à Bordeaux), où le mythe peut côtoyer les plus grandes déceptions (nous en reparlerons). Voilà pour une vision globale du vignoble, plutôt facile à se représenter comparativement à des appellations du Rhône aux cépages et assemblages multiples, ou aux vignobles du sud-ouest aux terroirs très morcelés…
Pourtant, derrière cette apparente simplicité d’approche, se cachent des singularités géologiques, climatiques et humaines complexes que l’on se doit d’appréhender avec humilité afin de déchiffrer ce terroir unique que le monde entier nous envie…
Un passé géologique mouvementé

Fermez les yeux et transportez-vous il y a 250 millions d’années… Comme en atteste la mappemonde ci-dessus, on est encore bien loin de l’espace Schengen !
On est au cœur de ce que l’on nomme « la grande dérive des continents ». Notre planète se dessine au gré de poussées tectoniques intenses qui caractérisent cette période ; elle s’étale de -250 millions d’année à -65 millions et on la nomme ère mésozoïque. Il faut imaginer que notre continent est composé de vastes plaines légèrement vallonnées. Les reliefs qui nous sont familiers aujourd’hui (Alpes, Massif central, Jura…) ne sont pas encore nés.
Les océans ont alors beaucoup plus libre cours qu’à notre ère actuelle puisqu’ils ne sont contraints que par très peu de reliefs. L’emplacement géographique de la Bourgogne va connaitre trois cycles notables d’avancée/recul de ceux-ci. Chacun de ces mouvements océaniques va engendrer une sédimentation marine particulière, liée aux origines géographiques de ces flots.
On sait par exemple que la première avancée marine, il y a 240 millions d’années, au Trias, venait des contrées germaniques ; le climat était alors tropical (attendez avant d’aller sur le site de la SNCF, ça a bien changé depuis), la mer peu profonde et la sédimentation très marneuse et calcaire avec la présence notable de nombreux organismes marins tels des coraux, des algues et des mollusques (très visibles sur le terroir chablisien notamment, où l’on retrouve quantité de petites huitres fossilisées datant du kimméridgien, une des époques de l’ère mésozoïque).
Entre -95 millions et -65 millions d’années intervient la 3ème et dernière avancée océanique, venant du bassin Londonien (plus à l’ouest). Elle inonde le bassin parisien et recouvre la Bourgogne ainsi que le nord du Massif central. Les sédiments vont s’agréger majoritairement sous forme de grès et de craies. Mais on n’en retrouve assez peu en Bourgogne, alors qu’ils constituent des terroirs essentiels de la vallée de la Loire (les fameux tuffeaux du Saumurois en sont la traduction directe)…
Entre ces phases marines, la mer se retire et l’on retrouve des dinosaures qui batifolent et s’adonnent à des barbecues préparés avec les restes des plus faibles d’entre eux, ce qui est nettement moins rigolo pour ces derniers, vous en conviendrez aisément.
Ces matériaux accumulés, issus de matières très variées comme nous venons de le voir, vont se transformer au cours du temps par diagenèse (ensemble des phénomènes de durcissement et consolidation des dépôts sédimentaires) en roches de consistances diverses : grès, argiles, marnes, calcaires. Dans chacune des familles de ces roches sédimentaires, on retrouve différentes dénominations, correspondant aux cycles de sédimentation que l’on vient d’évoquer. Et l’encépagement bourguignon est, vous l’aurez compris, intimement lié à ces variations géologiques.
Ainsi, le chardonnay se plait particulièrement sur les calcaires du kimméridgien, que l’on retrouve largement sur le territoire chablisien comme nous l’avons mentionné précédemment. Ils apportent finesse et minéralité au vin car c’est un calcaire poreux, qui accumule facilement de l’eau et où la racine aime à se développer. On retrouve souvent la mention « issus de terroir de calcaires kimméridgiens » au dos des bouteilles comme un gage de minéralité dans le flacon. NDA : c’est parfois une mode quelque peu agaçante chez les dégustateurs de chercher la minéralité jusque sous le matelas !
Dire que le vignoble bourguignon repose sur des terroirs argilo-calcaires est donc juste, mais diablement imprécis au vu des nuances gustatives que lui apporteront la variété de ce soubassement.
Pour terminer, une vue de la roche de Solutré, dans le mâconnais, célèbre pour son enchevêtrement de calcaires caractéristique de la faille bourguignonne dont nous allons parler par la suite.

Voilà pour notre petite virée du jour ! Si le spectacle vous a plu, parlez-en à vos ami ; si il vous a déplu, parlez-en à vos ennemis ! (Proverbe de clôture de Robert Kudlak, fondateur du cirque plume qui m'aura marqué à vie!) Ce contenu est public, destiné aux amoureux (de vin !); La suite du voyage d'ici peu! Merci d'être arrivé jusqu'ici, vous méritez bien un beau maillot jaune!
Damien, Le vin au vert.
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